Serena Williams. Une des plus grandes joueuses de tennis féminin de l'histoire, la seule joueuse dans ce siècle à avoir gagné les 4 tournois du Grand Chelem. Personne ne pourra donc remettre en question le fait que nous avons affaire à une joueuse puissante qui a su montrer son talent à de multiple reprise. Et pourtant sa condition féminine la place au centre de débats n’ayant à première vue aucun rapport avec le sport. En effet, lors d’une compétition en mai 2018, l'ex-numéro un mondial s’est vue interdite de porter une combinaison moulante noire sur le court car celle-ci n'était « pas assez jolie » et « pas assez féminine » au goût du président de Fédération Française de Tennis Bernard Giudicelli. Sauf que, monsieur le président, le but de Serena Williams n'est pas de se mettre en valeur ; c'est de gagner des matchs.
Pourquoi continue-t-on à attendre des femmes qu'elles soient sexy à tout moment ? Cela ne viendrait à l'idée de personne de dire que les shorts larges de Novak Djokovic ne le mettent pas en valeur, car il est avant tout considéré comme un athlète venu pour faire son travail, et non pas pour nous offrir une quelconque gratification visuelle. Comment est-il possible aujourd’hui de tenir des propos pareils, encore plus pour des personnes à un tel grade ? Il m’a pourtant suffi de quelques clics pour trouver que cette tenue a avant tout été dessinée par Nike pour permettre à la tenniswoman – tout récemment maman - d'avoir une meilleure circulation sanguine. De plus, même si la raison médicale – évidente - d’un tel choix n’avait pas existé, qu’en est-il du confort de l’athlète ? de ses goûts ? pourquoi se sentir obliger de se plier à des traditions qui pourrait jusqu’à entraver les performances sportives ? Les critiques des bourgeoises conservatrices présentes dans gradins du tournois de Rome n’ont été qu’exacerbées par la ressemblance de cette combinaison avec le design de celle de Black Panther, superhéros masculin, qui l’éloignait encore un peu plus des critères de féminité « classiques ». Ces critiques sont d’autant plus aberrantes qu’elles s’orientent uniquement sur l’aspect physique sans porter la moindre importance au talent sous-jacent ; et elles ne font que renforcer la pression - déjà omniprésente - sur le physique et l'apparence des femmes.
Ainsi, la sportive est devenue, plus ou moins volontairement, représentante de milliers de femmes dont le physique athlétique ne correspond pas aux standards, limités, de la féminité occidentale ; et elle permet ainsi d’interroger notre conception du corps féminin dans le milieu du sport, mais aussi dans nos quotidiens.
