Alors que la crise du coronavirus est représentée dans les médias comme une crise sanitaire, au-delà de la maladie, il est également question aujourd’hui de la dégradation de la santé économique internationale. Mais outre ces sujets récurrents, qu’en est-il des effets de cette crise sur l’environnement ? Depuis quelques semaines, des images diffusées sur les réseaux sociaux et sur les chaînes d’informations prônent en effet les conséquences positives de l’arrêt de l’économie mondiale sur l’environnement ainsi que sur la biodiversité. Les images d’animaux visibles dans des lieux inattendus d’ordinaire fréquentés par les humains ont largement circulé depuis le début de la pandémie. Pourtant, si ces scènes procurent un certain réconfort à voir la nature s’épanouir durant cette période, les effets du confinement sur l’environnement restent à mesurer et ne sont que marginaux.
Mais d’abord, restons positifs. Le confinement obligatoire qu’induit cette crise sanitaire réduit considérablement l’empreinte carbone à l’échelle internationale. Suite à la diminution drastique de l’activité économique, les images satellitaires se sont multipliées dans plusieurs pays. Selon la Nasa, les émissions de dioxyde d’azote ont diminué de 10 à 30% dans la région de Wuhan, épicentre chinois du Coronavirus, entre le 1er janvier et le 25 février 2020 en comparaison à la même période un an plus tôt. Alors pourquoi ces baisses spectaculaires ? Même si l’évaluation précise du ralentissement économique à l’échelle mondiale est difficilement mesurable, pour l’heure, force est de constater que ces baisses sont directement liées à la réduction des activités industrielles fortement dépendantes du charbon ou encore du pétrole.
À lui seul, ce chiffre illustre la baisse significative du taux de particules fines pendant la durée du confinement chinois. Et il en est de même pour l’ensemble des pays européens ainsi que pour les États-Unis depuis l’arrêt soudain de leur économie.
Cependant, et comme vous vous en doutez certainement, ces progrès ne sont qu’un trompe-l’œil. Si la planète « respire » pendant ce confinement général, elle n’est toutefois pas cicatrisée de l’ensemble des activités humaines. Comme l’a montré l’un des derniers post de l’APNA sur son compte Instagram, d’autres secteurs ne font que renforcer l’empreinte carbone pendant le confinement mondial. Alors quels sont-ils ? Leur impact négatif est-il plus important que les secteurs polluants bénéficiant d’une accalmie avec la crise du Corona ? Difficile de répondre dès à présent à cette question. Ce que l’on peut néanmoins observer dès aujourd’hui c’est l’augmentation spectaculaire du trafic internet et du réseau télécom. Ainsi, en Italie, Telecom Italia a constaté une augmentation de 70% du trafic internet après la fermeture des écoles tandis que les opérateurs français ont quant à eux été confrontés à une hausse de 50% depuis la première semaine complète de télétravail. Or, cette pollution numérique contribue à l’augmentation de la consommation d’électricité pour chaque ménage. Une autre incidence de cette crise sanitaire sur l’environnement, c’est qu’avant celle-ci, on parlait chaque semaine des marches pour le climat, de Greta Thunberg, de la convention citoyenne pour le climat. Or, depuis le début de la crise, tout cela n’existe plus ou presque. Médiatiquement, le seul sujet relatif à l’écologie réside dans l’amélioration de la qualité de l’air et de la régénération de la faune et de la flore. Et même temps, qui a envie d’entendre parler du réchauffement climatique ou de l’extinction de centaines d’espèces alors que l’on est confronté dans le présent à une crise soudaine ayant des conséquences graves sur nos propres vies ? Conséquence directe de la relégation de la protection de l’environnement au second plan : certains sujets actuels ayant un impact direct sur l’écologie et la biodiversité sont tout simplement omis des médias, des discussions et des préoccupations. Un exemple le plus significatif réside dans le feu de forêt qui sévit en ce moment même près de Tchernobyl. Ravageant une partie de la zone d’exclusion qui entoure Tchernobyl, ce feu crée des masses d’air contenant des « radionucléides ». Et ces fumées radioactives, même si elles sont déclarées « sans conséquence sanitaire » par les autorités, elles sont pourtant déjà passées par l’Alsace, Clermont-Ferrand et Marseille. Pourtant, en aviez-vous entendu parler avant d’avoir lu cet article ? La réponse est probablement négative, et cela est tout simplement dû à une relégation au second plan de la question de l’écologie.
Ainsi, ne confondons pas les observations sur le court et sur le long terme. Oui, aujourd’hui la planète peut à nouveau souffler pendant que nous sommes tous chez nous, mais à long terme cette crise pourrait avoir des conséquences désastreuses sur l’environnement : la crise sanitaire devenant une crise économique mondiale, la priorité va être accordée au sauvetage de nos systèmes économiques et non à la reconfiguration complète de ceux-ci.
Par Emma Garnaud
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