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  • Photo du rédacteurAlbert Controverses

DOSSIER : Quand Amnesty rend hommage à ces héros de l’ombre

Les siècles derniers ont vu fleurir de nombreuses personnalités qui ont imposé leur vision du monde et leurs idéaux changeant le cours de l’Histoire. À cet égard, on peut nommer Martin Luther King et sa lutte contre la ségrégation raciale ou encore Gandhi, qui a conduit à l’indépendance indienne, et d’autres combats en faveur de l’égalité. Ces personnalités sont connues de tous et sont sources d’inspiration dans un monde en pleine métamorphose. Cependant, il subsiste encore à l’heure actuelle nombre d’inconnus qui au nom des droits humains s’érigent contre ceux qui les bafouent. C’est à ces héros qu’Amnesty International a voulu rendre hommage.


Amnesty International, organisation non-Gouvernementale, défenseur des droits humains a célébré ces héros de l’ombre, ces personnalités inconnues qui se battent chaque jour pour le respect des droits de l’homme. À l’occasion du Sommet des défenseurs des droits humains d’octobre 2018, l’association internationale a lancé une nouvelle campagne, appelée BRAVE (courage, en français).


Cette campagne cherche à faire connaître ces défenseurs du quotidien, et la lutte dans laquelle ils s’engagent, ainsi que les nombreuses violations et dangers auxquels ils sont confrontés. En 2017, selon un rapport d’Amnesty, c’est 321 défenseurs des droits de l’homme qui ont été tués. Parallèlement, selon le rapport de juillet 2018 de l’ONG Global Witness, trois défenseurs des droits de l’homme ont été tués chaque semaine en 2018.


Amnesty International, association riche de 7 millions de membres, soutient ces électrons libres, rappelant sans cesse : « Mieux vaut allumer une bougie que maudire les ténèbres ».


Les droits de l’homme restent un domaine très large : de la lutte LGBTI au droit des femmes, en passant par la lutte contre les discriminations raciales ou encore la protection de l’environnement ou de l’enfance, ces personnes sont engagées dans divers combats.



Retour sur quelques-unes de ces personnalités de l’ombre.

La lutte pour le droit des femmes est à l’heure actuelle un combat de premier plan, menée dans de nombreux pays par les FDDH (femmes défenseurs des droits des humains). BRAVE souligne les actions menées par Noira Candelo Riascos, une afro-colombienne. Porte-parole de l’Asociacion de Mujeres Afrocolombianas Emprendedoras Asomamiwata, (association d’entrepreneurs féminins), elle se bat pour le droit des femmes noires, ainsi que pour l’amélioration de leurs conditions de vie. La Colombie est touchée par des conflits armés opposant Farc et paramilitaires. Des défenseurs des droits sont tués chaque jour. Ainsi, dans un contexte déjà dangereux, Noira mène ses actions dans un pays machiste et encore très patriarcal. Elle prend en charge de nombreux cas de viols, par la nomination de procureurs en exercice dans les zones rurales. En effet, encore aujourd’hui, nombreux sont les pays discriminants à l’égard des femmes les excluant des services de santé, de l’éducation ou encore de l’emploi, les empêchant d’exercer nombre de leurs droits fondamentaux. Les FDDH continuent leur combat pour le droit des femmes et l’égalité des genres malgré les attaques dont elles sont victimes.


On peut aussi citer un des cas les plus célèbres d’Amnesty : Yasaman Aryani. Cette jeune femme a été condamnée par les autorités iraniennes à 16 ans de prison après avoir retiré son voile et distribué des fleurs blanches aux femmes dans le métro à l’occasion de la journée internationale des droits des femmes. Amnesty International s’est emparé du sujet, créant une pétition pour source : Amnesty, portrait de Yasaman Aryani. À l’occasion du Sommet des défenseurs des droits humains d’octobre 2018, l’association internationale a lancé une nouvelle campagne, appelée BRAVE (courage en français) sa libération à l’occasion des 10 jours pour signer. À ce jour, la pétition - toujours en ligne - a recueilli plus de 100 000 signatures. Nous restons pourtant sans nouvelle de la jeune femme.


Les violations des droits de l’homme ne font pas exception dans les pays occidentaux, y compris en France, pourtant pays de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Amnesty, au travers de la campagne BRAVE, a mis en lumière le cas de Loan Torondel (page suivante), défenseur des droits des migrants et des réfugiés. Le jeune homme de 22 ans, engagé auprès de l’association l’Auberge des migrants à Calais, a été confronté aux violences auxquelles sont soumis les migrants dans le camp de Calais. Les autorités publiques violent le droit de ces personnes à une vie décente par la confiscation de biens de première nécessité. Loan a dénoncé les abus que subissent les réfugiés, au travers des réseaux sociaux et se trouve poursuivi pour diffamation. Malgré les risques de condamnation qui pèsent contre lui, Loan n’arrête pas son combat : il est actuellement engagé auprès de Médecins sans frontière, et se bat pour l’accès aux soins des migrants.


Le cas de Loan n’est pas unique en France. Nombreux sont les défenseurs des droits de l’homme poursuivis par les autorités françaises. Dans le cadre des manifestations des gilets jaunes, la jeune observatrice pour la Ligue des Droits Humains, Camille Halut, s’est retrouvée au poste de police. Présente pour documenter les pratiques des forces de l’ordre, elle souhaitait alerter la population et le gouvernement sur certaines dérives, mais subit des intimidations de la part de la police française. Amnesty s’est saisi de ce cas dans le cadre des 10 jours pour signer, pour mettre fin à ce harcèlement.


La reconnaissance des droits pour la minorité LGBTI (lesbian, gay, bisexual, transgender, intersexed) est aussi un terrain de combat pour les militants des droits de l’homme. La campagne BRAVE a mis en lumière 22 le courage de Vitalina Koval (cidessous), homosexuelle ukrainienne. Engagée dans la lutte des droits des LGBTI, elle vit son homosexualité au grand jour, malgré les persécutions qu’elle subit dans un pays encore en proie à de nombreuses discriminations. Elle a ouvert un centre d’écoute et de partage pour cette minorité, mais ne cesse de subir des violences : prenant part avec d’autres militants à une marche pacifique pour la journée internationale de la femme le 8 mars 2018, elle est violemment attaquée par un groupe d’extrême-droite. Ses agresseurs sont très vite relaxés par la justice ukrainienne. Grâce à cette histoire, la jeune femme est devenue un symbole pour de nombreux homosexuels dans son pays. À l’aide de sa notoriété et des actions d’Amnesty, la militante a réussi à faire pression sur le gouvernement ukrainien, pour un meilleur encadrement et une meilleure protection des marches pacifiques, revendiquant un droit à la décence pour les minorités sexuelles. Nombreux pays criminalisent ou discriminent de nos jours l’homosexualité. Levan Akin le raconte dans son film, «Et puis nous danserons», racontant l’histoire d’un jeune danseur homosexuel en Georgie, dont la vie bascule.


D’autres défenseurs des droits humains s’érigent contre les grandes firmes multinationales, qui n’hésitent pas à menacer le droit des populations ou à contraindre ces militants de l’ombre. C’est le cas pour le peuple K’iche’, menacé par les collusions entre l’Etat du Guatemala et les multinationales implantées dans le pays. Aura Lolita Chavez Ixcaquic défend le droit à la terre de ce peuple autochtone, dans un Etat marqué par la corruption. La militante a reçu des menaces de mort, et a été victime de tentatives de viol et de violences physiques. Cela ne l’empêche pas de continuer son combat et de défendre le droit à la terre de la minorité K’iche’. Ce cas n’est pas unique. Aux Philippines, Marinel Summok Ubaldo se bat pour la prise en compte de la situation précaire de son peuple : son village du Samar oriental a subi de nombreux désastres après le passage du typhon 23 Yolanda, en novembre 2013. Depuis, le gouvernement philippin n’a quasiment pas réagi, laissant le peuple vivre dans des conditions déplorables. La jeune fille se bat avec d’autres jeunes pour la prise en compte par les gouvernements et les entreprises du dérèglement climatique, touchant son pays et ses habitants, en invoquant le droit à une vie décente. Son cas a été représenté par Amnesty, dans le cadre des 10 jours pour signer, soutenant la jeune femme dans son combat pour la justice climatique. Amnesty International a voulu rendre hommage à ces héros du quotidien, inconnus, qui tendent par leurs convictions à l’amélioration de notre condition humaine, perpétuellement remise en question par d’irréversibles contraintes.


À ce titre, Stephan Sweig dans son livre Conscience contre violence nous met en garde : « un droit n’est jamais conquis définitivement ni aucune liberté à l’abri de la violence, qui prend chaque fois une forme différente. L’humanité se verra contester chacun de ses progrès, et l’évidence sera de nouveau mise en doute. (...) Seule l’idée de liberté spirituelle, idée suprême que rien ne peut détruire, remonte toujours à la surface parce qu’éternelle comme l’esprit ».


Par Elsa Saez

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