En Inde, l’hindouisme est la religion la plus pratiquée avec presque 80% de la population qui est croyante. D’après de nombreux historiens, c’est en partie de ce culte que le système des castes tire son origine. Il a ensuite été renforcé par la colonisation britannique. Cependant, cette structure complexe et les discriminations qui en découlent ont été abolis par la Constitution indienne de 1950. Cette abolition peut être questionnée, notamment à l’égard des Dalits, plus connus sous l’appellation péjorative « d’Intouchables ».
En effet, la religion hindoue serait aux prémices du système des castes indiennes. Bien que cette origine fasse l’objet de nombreux débats, des textes datant de 1 500 ans avant notre ère évoquent la notion de Varna, qui signifie « couleur ». Il ne s’agit alors que d’attribuer à chacun un rôle dans la société selon ses traits de personnalité. On retrouve donc les Brahmanes (prêtres, professeurs…), les Kshatriyas (gouvernants, guerriers…), les Vaishyas (artisans, marchands…) et les Shudras (ouvriers, serviteurs…). Progressivement émerge la notion de Jäti, qui signifie « naissance ». La société du sous-continent indien commence à se rigidifier et les personnes issues d’une même naissance se marient entre elles : la fameuse homogamie se met en place. On retrouve donc des catégories plutôt larges qui correspondent au système Varna, puis à l’intérieur de celles-ci des catégories plus restreintes et nombreuses du système des Jäti. Ces systèmes sont d’ailleurs différents selon les régions mais aussi les époques, avec des castes Jäti qui disparaissent pour laisser la place à de nouvelles. C’est aussi l’occasion de la hiérarchisation des castes, avec ceux qui n’appartiennent à aucune caste et ceux considérés comme « pollués », au plus bas de l’échelle sociale : les Dalits ou « Intouchables ». Pour le reste de la population chacun doit s’acquitter d’une tâche pour servir les intérêts de tous.
Ensuite, le principe de pureté est central pour comprendre les restrictions qu’implique chaque caste. Par exemple, un phénomène aussi naturel que les menstruations est considéré comme de la pollution temporaire. Différents rites de purification sont alors suivis. Plus la caste est estimée dans la société, moins elle effectue des actions dites « polluantes » et ne peut donc entrer en contact avec des catégories plus basses, au risque d’être contaminée. Pour en revenir aux Dalits, leur naissance les condamne aux métiers les plus « impurs » ce qui rend impossible leur présence dans les temples notamment.
Intéressons-nous maintenant à la colonisation britannique. Présents depuis 1600 avec des comptoirs, ils ont dominé réellement le sous-continent indien à partir de 1757, pour en prendre le contrôle près de 100 ans plus tard. Le système des castes existe déjà, mais la société devient encore plus rigide. En effet, les colons s’y appuient pour répartir les tâches de l’administration en fonction des castes. En revanche, l’espoir naît pour les Dalits sous le règne britannique. Des politiques sont mises en œuvre pour essayer de les intégrer à la société en créant des écoles spécialisées par exemple. Ces efforts sont très insuffisants mais permettent d’observer l’émergence des premiers leaders de cette caste. Nous verrons par la suite comment l’Indépendance de l’Inde a permis de se détourner de ce système inégalitaire. Il ne s’agit pas ici de revenir sur la prise de l’indépendance qui a précédé la séparation du territoire en deux pays : l’Inde et le Pakistan. La constitution de 1950 fait de l’Inde une république parlementaire fédérale. Celle-ci interdit toute discrimination selon la caste et déclare le concept « d’intouchable » comme illégal. Pour expliquer en partie cette remise en cause, le personnage de Ambedkar est central. Membre des Dalits, il a toujours lutté pour la fin de ce système discriminatoire, on lui confie alors la présidence du comité de rédaction de la Constitution. Quant à Mohandas Karamchand Gandhi, il ne s’oppose pas entièrement à l’organisation de la société par castes mais s’opposent évidemment au sort que subissent les Dalits. Pour aller plus loin, plusieurs États fédérés ont depuis mis en place des politiques qui passent outre les castes : des quotas au sein du gouvernement, des politiques de discrimination positive dans le monde professionnel et éducatif en faveur des castes discriminées…
Pourtant, force est de constater que la hiérarchisation des classes et les mesures que chacune doit respecter continuent d’influencer fortement la société contemporaine. Les Dalits restent la population la plus pauvre et ayant le moins accès à l’éducation, alors qu’ils représentent 17% de la population indienne. Les nombreux incidents relatés par les médias constituent une autre preuve de la perpétuation du système discriminatoire. D’un autre côté, on observe aussi des exemples de personnes ayant réussi à sortir de la classification de Dalit. Pour certains, se convertir à une autre religion est la solution choisie car le système de castes n’existe qu’au sein de l’hindouisme. C’est d’ailleurs le cas d’Ambedkar qui s’est converti au bouddhisme. Cette possibilité donne lieu à des conversions massives, 50 000 personnes en 2007 par exemple. Pour d’autres, il s’agit de profiter du contexte de certaines villes ou régions dans lesquelles l’influence des castes est plus en retrait. C’est ainsi qu’Ashok Khade, fils d’un cordonnier analphabète, est aujourd’hui un entrepreneur millionnaire à la tête de DAS Offshore. Ces parcours restent malheureusement exceptionnels, et l’extrême pauvreté continue de sévir en Inde, touchant inégalement les différentes catégories de la population.
Le système des castes indiennes demeure très complexe et presque impossible à définir. Dépendantes des régions, le nombre de Jätis s’élève à plusieurs milliers ce qui multiplie les considérations et les règles dont elles peuvent faire l’objet. Ainsi, la lutte contre la domination des castes continue d’évoluer dans tout le pays.
Sara Zarroug
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